Moins d’humains, plus d’IA : le grand numéro de Meta
Ou comment le géant "social" compte vous hypnotiser avec des mind-like AIs.
Meta a annoncé la fin de la modération humaine sur Facebook et Instagram. À sa place, des "notes communautaires" et des algorithmes. Officiellement, il s’agit de défendre la liberté d’expression, de réduire la censure, de simplifier les politiques sur des sujets sensibles. Mais cette façade masque un objectif bien plus clair : accélérer le flux de contenus, maximiser l’engagement. Moins de garde-fous, c’est plus de viralité, plus de polarisation.
Et ce n’est pas tout. Cette stratégie, surtout, ouvre grand les vannes pour l’intégration massive de l’IA.
Car parallèlement, la firme de Marck Zuckerberg a déjà commencé à tester des fonctionnalités comme la création de versions IA de soi-même sur Instagram, permettant aux utilisateurs de générer des avatars personnalisés (identité éclatée, ça vous parle ?) Des chatbots basés sur des individus spécifiques ou des personnages imaginaires sont aussi en préparation, visant à “enrichir l’interaction sociale” sur la plateforme (ou ce qu’il en reste). Enfin, des outils de montage vidéo propulsés par IA promettent de réinventer les contenus audiovisuels, rendant chaque publication plus immersive et engageante (Et qu’importe ce qu’on sacrifie au passage.)
Mais le plus fascinant (ou terrifiant) est peut-être la vision qui semble se dessiner. Car voyez-vous, Meta a récemment publié un papier explorant un domaine aussi technique que symbolique : la "Theory of Mind" appliquée aux modèles linguistiques. Cette capacité, propre aux humains, consiste à comprendre ce que les autres pensent, croient, ou ressentent.
Selon l’étude, même les IA les plus avancées, comme GPT-4o ou Llama, échouent sur des tests de Theory of Mind complexes, atteignant parfois des taux de réussite proches de zéro. Et c’est là que ça devient intéressant : pourquoi Meta investirait-il dans des frameworks comme ExploreToM pour évaluer et entraîner ses IA à ces tâches ? Pas par curiosité philosophique, assurément.
Si Meta s’intéresse à ces concepts, c’est qu’ils construisent quelque chose. Quelque chose de bien plus grand qu’un simple outil de contenu génératif. Ils tentent de doter leurs IA d’une "intelligence sociale", une compréhension simulée mais suffisamment convaincante pour captiver nos esprits.
Maintenant, laissez-moi semer une autre graine. La plupart des LLM sont construits à partir de corpus de données humaines en ligne. (On gagnerait d'ailleurs à avoir un Nutri-Score des contenus qui nourrissent un LLM, mais ça, c’est un autre débat.) X, par exemple, a déjà annoncé exploiter les données de sa plateforme : des contenus souvent plus parlés, plus réflexifs, plus instinctifs. Vous voyez l’idée.
Et Meta, dans tout ça ? Officiellement, silence radio. Mais réfléchissez : Facebook, Instagram… des années de données intimes. Pas seulement des posts publics, mais aussi des messages privés, des confessions spontanées, des souvenirs familiaux. Tout ce qui, depuis des années, raconte nos vies.
Alors, vraiment, vous pensez que Meta laisse ce trésor inexploré ? Une base de données aussi ancrée dans l’intime, un miroir aussi précis de nos vulnérabilités...
En 2023, des enregistrements de réunions internes ont révélé que Meta envisageait l'acquisition de Simon & Schuster, l'une des plus grandes maisons d'édition américaines, pour enrichir ses modèles d'IA avec des œuvres littéraires de qualité. Et imaginez si Facebook rachetait une entreprise comme Automattic, propriétaire de WordPress, qui a elle-même déjà acquis Day One, une application de journal intime numérique.
Vous l’aurez compris : Meta ne se limite pas à créer des outils, il façonne des illusions. C’est le prochain Copperfield du numérique. En exploitant des récits humains intimes, il entend probablement concevoir des interactions si parfaites qu’elles deviennent hypnotiques. Son véritable tournant ? Comprendre qu’un esprit se captive en lui renvoyant un miroir, poli par des algorithmes et éclairé par ses propres failles.
Mais, lorsque chaque interaction est optimisée pour maximiser notre attachement, pouvons-nous encore distinguer entre ce que nous voulons réellement et ce que les algorithmes veulent que nous désirions ?
Alors, demain, posez-vous la question : serez-vous encore l’auteur de votre histoire ou un personnage secondaire dans celle de l’IA ? À moins que, par un ultime pied de nez, il ne reste plus que des bots parlant à des bots. Ce serait bien mérité.
MD
Merci pour ces perspectives absolument terrifiantes mais dont chacun devrait prendre conscience ; mais je crois bien que le mal est fait, avec tout ce que nous avons semé.
Très belle analyse, très éclairante sur les nouveaux avatars du capitalisme de surveillance. Pas besoin de lire dans nos cerveaux. Nous fournissons nous-mêmes les fers de notre esclavage. La nouvelle servitude volontaire.