Pourquoi la Renaissance française est sur le point de conquérir le monde
Comment la France séduit la jeunesse mondiale et diffuse la prochaine génération de start-ups créatives - un article co-écrit avec Thomas Owadenko et Dominique Delport.
Les start-ups françaises au cœur de l'actualité
Le mois dernier, les droits mondiaux de la NBA ont été signés par deux licornes françaises du secteur du divertissement : d'une part, Jellysmack, une start-up qui aide les créateurs vidéo à rayonner sur toutes les grandes plateformes numériques, a obtenu les droits exclusifs d'exploitation du contenu officiel de la NBA afin d'accroître la visibilité de cette dernière en Europe et au Moyen-Orient.
D'autre part, Sorare, start-up évaluée à 4,3 milliards de dollars, un jeu de fantasy football basé sur la valorisation de la performance réelle des joueurs de foot dans une bourse virtuelle à base de crypto-monnaies, va se diversifier avec le 1er jeu de fantasy basketball NBA qui, sur le même principe, permet de miser un portefeuille boursier sur la performance des joueurs de la NBA. Mais l'économie des créateurs n'est pas le seul secteur qui fait vibrer les start-ups françaises.
La semaine dernière lors de la Fashion Week à Paris, la marque de mode parisienne Coperni a pris TikTok et le reste du monde par surprise avec la 1ère robe en spray vaporisée sur le mannequin Bella Hadid, tandis que BeReal, au sommet de sa popularité avec ses 14,7M de téléchargements rien qu'en septembre, est devenue l'application sociale préférée des jeunes générations. Saviez-vous également que Ledger, une autre société basée à Paris qui conçoit et gère des portefeuilles de crypto actifs, sécurise désormais plus de 20 % des crypto-monnaies et des actifs numériques du mondiaux dans +5 millions de portefeuilles vendus ? Ou que Voodoo a dépassé les 6 milliards de téléchargements avec sa centaine de jeux hyper casual créés, ce qui place cette licorne française au troisième rang mondial des téléchargements derrière Meta et Google depuis la création de l'App Store ? Dingue, non ?
Qu'ont en commun toutes ces start-ups en pleine effervescence ? Elles sont toutes axées sur la génération Z et ouvrent la voie à l'économie de demain. Car les Gen Z sont la génération la plus importante, représentant déjà près de 30 % de la population mondiale et qui devraient constituer 27 % de la masse salariale d'ici 2025. Homa Games, Powder, Playplay, Yubo, Feels, Maki, Chefclub, Dogami, Kard... la liste des start-ups C2C à fort potentiel pour les Gen Z ne cesse de s'allonger, témoignant du fait que la Z-économie est en marche, avec de multiples initiatives pour embarquer tout le monde dans ce voyage.
la France, temple historique de la création
Si la France est connue pour son attractivité (1ère destination touristique au monde, le premier pays en termes de chefs triplement étoilés au Michelin,...) depuis deux ans, la France est également le premier pays d'Europe pour les investissements directs étrangers, un effet avoué des "Macronomics". Et si le leadership dans l'industrie du luxe et de la mode continue de croître avec 28 % de part de marché mondiale, ce succès a toujours été lié au rayonnement de très grandes entreprises (nos GAFA sont les KHOL comme Kering-Hermès-l'Oréal-LVMH.) La situation est similaire dans les secteurs du divertissement et de la création publicitaire, avec des poids lourds comme Ubisoft, Vivendi, Publicis, Havas ou Banijay-Endemol-Shine, la plus grande société de production de contenus au monde. Pendant des années, la France, sous le label "French Tech", a gagné ses galons de second pays après les États-Unis pour le nombre de start-ups présentes au CES de Las Vegas, avec des succès comme Withings, Devialet, et un soutien public massif des pouvoirs publics. Mais ce qui se joue en ce moment autour de la Génération Z est très différent.
La maîtrise par une nouvelle génération d’entrepreneurs français du digital, de l’intelligence artificielle et des effets de réseau brisent les silos entre les industries et mélangent code et culture, contenu et données, inspiration et machine learning de façon unique, touchant comme une traînée de poudre la jeunesse mondiale. Cette alchimie magique entre la France et la Génération Z a une explication : l’ardent besoin d’exprimer sa propre créativité. Selon une étude Vice Insights de 2021, "la Créativité " est la compétence que 74% des Gen Z veulent maîtriser pour leur future développement. Et les start-ups tricolores sont les meilleures à créer des plateformes innovantes pour leur permettre de s’exprimer. Comme l'a très justement écrit Seth Godin : "Les gens n'achètent pas des biens et des services. Ils achètent des relations, des histoires et de la magie". Et cela n'a jamais été aussi vrai que pour la Gen Z, l'une des générations les plus créatives et entrepreneuriales de tous les temps. 46% des jeunes de moins de 24 ans en France souhaitent créer leur propre entreprise. Il y a dix ans, la majorité des jeunes français voulaient devenir fonctionnaires avec la sécurité de l’emploi à vie. Il s'agit d'un changement radical, et pas seulement au sein des Grandes Écoles les plus huppées.
Même sans diplôme ni ressources financières, il est possible de s'inscrire dans l'une des meilleures écoles de code au monde, l'École 42, qui s'est déjà développée dans 20 pays avec un concept disruptif : pas de prérequis ni de diplôme nécessaire pour s’inscrire, zéro frais de scolarité, et zéro professeurs mais une sélection au mérite, quatre années d’efforts intensifs et 31 niveaux de programmation à valider via un apprentissage en peer to peer. Et une fois leur diplôme en poche, ces étudiants de la Gen Z rejoindront peut-être l'emblématique Station F de Paris, le plus grand incubateur du monde, qui accueille 1 000 start-ups sous le toit d'une gigantesque gare du XIXe siècle (Halle Freyssinet), un bâtiment aussi long que la Tour Eiffel (300 m) et qui attire pour moitié des entrepreneurs du monde entier ! Oui, ‘Emily is in Paris’, mais elle n'est pas la seule. Paris ressemble de plus en plus à une nouvelle Silicon Valley.
Code & culture : la Renaissance française
Époustouflant, non ? La France a historiquement toujours su marier technologie et culture, depuis les frères Lumière (inventeur du premier cinématographe et du cinéma), Georges Méliès (premiers effets spéciaux à l'écran) ou Nicéphore Niepce (inventeur de la photographie). Plus récemment, DailyMotion, Deezer et Viadeo ont été créés avant même que leurs grands-frères Youtube, Spotify et LinkedIn voient le jour ! Mais à cette époque , les start-ups avaient besoin d'accéder à des capitaux importants pour se développer à l'échelle mondiale, et du fait d’un système bancaire et financier très conservateur en France et d’une scène de capital-risque limitée, ces pépites ont eu plus de mal à financer leur expansion à l’international. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, grâce à différents facteurs, dont la création en 2012 de Bpifrance, la banque publique d'investissement française, un modèle unique au monde. (Disclaimer : Marie travaille pour Bpifrance en tant que responsable France de la plateforme EuroQuity). Il faut également ajouter l'intérêt croissant des investisseurs internationaux comme Tiger, GE, Softbank & co qui ont eu un coup de cœur pour les entrepreneurs français de nouvelle génération et ont aidé à financer 27 licornes françaises (contre 3 en 2017). Autre fait notable, le capital-risque s'est démocratisé avec des entrepreneurs à succès qui se reconvertissent en VC puissants (les fondateurs emblématiques de Free, Smartbox, Blablacar, Criteo,...), tandis que les réseaux de business angels, les plateformes de crowdfunding et les nouveaux véhicules d'investissement portés par les consommateurs poussent comme des champignons.
Mais la véritable raison est que cette "Renaissance française" mêlant culture et code, contenus et algorithmes et qui a vu des UX novatrices s’imposer dans les App stores s’inscrit profondément dans l'ADN de notre pays. Alors que le Royaume-Uni s'est construit sur la finance et les échanges internationaux, que l'Allemagne a bâti la puissance de ses Länders sur l'ingénierie et les machines-outils, la France a toujours incarné un savant mélange de cartésianisme et de culture créative. C'est cela le caractère unique et universel du Château de Versailles, des jardins de Lenôtre et de ces plans d’eau dessinés au cordeau : la géométrisation du savoir et de la création, la symétrie axiale au service de l’esthétisme, car Louis XIV était entouré d'autant d'artistes que de scientifiques. Une quintessence française. C'est aussi pour cela que la Tour Eiffel est l'un des bâtiments les plus visités (et les plus Instagrammés) au monde. Au-delà de la prouesse technique de l'ingénieur Gustave Eiffel et de son équipe qui ont construit en 1887 ce monument d'acier de 18 000 pièces en seulement deux ans, deux mois et cinq jours, c'est aussi une incroyable pièce d'architecture et de design qui traverse les époques et symbolise Paris, la Ville Lumière, et la France dans le monde entier.
Le journaliste brésilien Caio Tulio Costa a déclaré : "Ce ne sont pas les langues qui définissent les frontières d'Internet mais les liens culturels.". La France est désormais bien placée pour être l'un des pays les plus attractifs pour la Gen Z en créant des plateformes mêlant expression de soi et algorithmes et en aidant les créateurs et entrepreneurs uniques à émerger. Si Israël est la "start-up nation", la France est définitivement en train de devenir la "start-up nation" culturelle pour les générations futures.
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Marie Dollé, Dominique Delport, Thomas Owadenko.
Très inspirant ! Merci !
Génial comme perspective. Très inspirant. Merci 🙏